Petit noir Andalou
La Isla Minima, d’Alberto Rodriguez
Si le cinéma espagnol semble se résumer souvent à l’unique aura de Pedro Almodovar en France, certaines pépites traversent pourtant les Pyrénées de temps en temps…
C’était le cas du magnifique Blancanieves de Pablo Berger en 2013, un Blanche Neige muet, noir et blanc, dans une Andalousie fantasmée.
Ambiance andalouse toujours, la Isla Minima, dans le registre du polar noir (très noir…), est de cette veine là, discret mais puissant…
Synopsis : Deux flics que tout oppose, dans l’Espagne post-franquiste des années 1980, sont envoyés dans une petite ville d’Andalousie pour enquêter sur l’assassinat sauvage de deux adolescentes pendant les fêtes locales.
Au cœur des marécages de cette région encore ancrée dans le passé, parfois jusqu’à l’absurde et où règne la loi du silence, ils vont devoir surmonter leurs différences pour démasquer le tueur.
Les pieds dans le Guadalquivir
Le personnage principal de ce film, c’est le paysage. Le fleuve du Guadalquivir, ses méandres et les marécages infinis de son delta. Une ambiance étrange, aussi magnifique qu’humide et inquiétante…
Une beauté naturelle qui se heurte à la pauvreté réelle de cette Andalousie au sortir de 36 ans de dictature. Derrière les façades défraîchies, les portraits de Franco ne sont jamais loin et les langues plutôt silencieuses face aux disparitions de jeunes filles…
En jetant les codes classiques du polar dans cette ambiance électrique, en modelant l’ambiguïté de la relation classique « bon flic/mauvais flic » et en grattant derrières les positions sociales de chacun, cette « petite île » dévoilera des secrets parmi les moins avouables…
True Detective Andalous
La Isla Minima a été, à sa sortie, très vite comparée à la première saison de la série True Detective qui renouvelait alors le genre du thriller tout en conservant ses codes les plus classiques.
Si cette comparaison est amplement méritée, l’intrigue pourrait être ici un prétexte pour parler d’une période quelque peu mise sous cloche en Espagne. A travers les portraits de chaque personnage, le réalisateur réinterroge la mémoire douloureuse d’un pays après 36 ans de dictature, entre oublis, douleurs, arrangements et compromissions.
Un film qui ravira les amateurs de films noirs…