Une vie en cage
Le Mars Club de Rachel Kushner
San Francisco, années 80. Romy Hall, 29 ans, vient d’être transférée à la prison pour femmes de Stanville, en Californie. Cette ancienne stripteaseuse doit y purger deux peines consécutives de réclusion à perpétuité, plus six ans, pour avoir tué l’homme qui la harcelait. Dans son malheur, elle se raccroche à une certitude : son fils de 7 ans, Jackson, est en sécurité avec sa mère. Jusqu’au jour où l’administration pénitentiaire lui remet un courrier qui fait tout basculer…
La prison comme si vous y étiez
Ce roman débute par un transfert de prisonnières à la prison de Stanville en Californie. Dès les premières pages, le lecteur embarque pour un voyage cauchemardesque avec les détenues enchaînées et encagées dans un fourgon cellulaire pendant une dizaine d’heures. Le manque d’air et d’espace, la promiscuité en sont un véritable enfer pour ces femmes traitées pire que du bétail. Parmi elles, Romy Hall, stripteaseuse de 29 ans, condamnée à la prison à perpétuité pour avoir tué un client qui la harcelait.
Ca démarre fort et on est tout de suite plongé dans l’ambiance de ces prisonnières traitées comme des dindes de Thanksgiving en partance pour l’abattoir… en l’occurrence pour la prison de Stanville, Californie, terminus de leur vie pour la plupart d’entre elles. Leur quotidien désormais : survivre. Survivre à la violence, aux intimidations, aux matons, à l’isolement par la solidarité, les petites combines pour améliorer l’ordinaire ou le travail. Seul lien tangible avec l’extérieur, les cours de littérature dispensés aux prisonnières volontaires par Gordon Hauser, un prof admirateur de Dostoïevski, qui croit au pouvoir des mots bien plus qu’à la nature humaine. Dans cet univers impitoyable, l’auteur réussit à distiller de l’émotion, des sourires, de l’espoir, des larmes qui font écho à la déshumanisation et aux humiliations subies par les détenues.
Pas de seconde chance
A travers cette histoire qui se déroule aux Etats-Unis dans les années 80, Rachel Kushner dénonce avec force le déterminisme social. Elle décrit le parcours d’une jeune femme qui a tiré les mauvaises cartes dès sa naissance et qui termine en prison parce qu’elle n’a pas eu la bonne famille, le bon quartier, la bonne école, le bon partenaire, les bons amis ou le bon avocat. Elle s’attaque aussi violemment au système judiciaire américain qui n’accorde aucune seconde chance à ceux et celles qui croupissent derrière les barreaux. Plus qu’un roman, un véritable plaidoyer pour une justice plus humaniste et égalitaire, un sujet plus que jamais d’actualité …
Un coup de coeur amplement mérité pour ce livre percutant au réalisme saisissant, à l’écriture sensible et récompensé par le prix Médicis étranger 2018.